CULTEQuelle est la place des religions dans la vie des Français ?

Quelle est la place des religions dans la vie des Français ?

CULTEQu’ils soient catholiques, musulmans ou juifs, une étude de l’Insee parue ce jeudi dresse le portrait des croyants en France, dont les pratiques religieuses diffèrent sensiblement
La fréquentation de lieux de cultes diffère beaucoup d'une religion à une autre et la pratique dans le cadre privé est en progression.
La fréquentation de lieux de cultes diffère beaucoup d'une religion à une autre et la pratique dans le cadre privé est en progression.  - Canva / Canva
Delphine Bancaud

Delphine Bancaud

L'essentiel

  • Le catholicisme demeure la religion dominante en France, selon une étude de l’Insee parue ce jeudi. Même si une majorité de personnes vivant dans notre pays se déclare sans religion.
  • Les pratiques religieuses sont peu assidues chez les catholiques et plus actives pour les musulmans.
  • La transmission religieuse est plus forte dans les familles musulmanes et juives, que chez les chrétiens.

La place de la religion dans la vie des personnes résidant en France fait souvent l’objet de contre-vérités dans le débat public. D’où l’intérêt de l’étude de l’Insee sur la diversité religieuse en France parue ce jeudi, d’autant que la question rarement traitée par les statistiques publiques. Selon celle-ci, le catholicisme reste la première religion déclarée dans notre pays en 2019-2020 (revendiquée par 29 % des 18 à 59 ans), suivie par l’islam (10 %). La proportion de personnes se déclarant d’une autre religion chrétienne (protestante ou orthodoxe) atteint 9 %. Reste que 51 % des personnes vivant en France se disent sans religion alors qu’elles n’étaient que 45 % il y a dix ans.

L’empreinte historique du catholicisme reste donc prégnante dans notre pays, même si la proportion de personnes se revendiquant de cette religion a chuté de 8 points entre 2008 et 2019, alors que le nombre de musulmans sur notre sol a gagné 3 points. « Une progression qui s’explique notamment par l’arrivée d’immigrés en France, issus de pays où le poids de la religion est fort (Maghreb, Turquie ou Moyen-Orient, Afrique sahélienne) », éclaire Patrick Simon, sociodémographe français à l’Institut national d’études démographiques (Ined).

Seulement 8 % des catholiques se rendent régulièrement à L’Eglise

Mais qui dit croyant, ne dit pas forcément pratiquant régulier. Le respect du dogme diffère en effet beaucoup d’une religion à une autre. Selon l’Insee, 8 % des catholiques se rendent régulièrement à L’Eglise, contre 22 % des autres chrétiens (protestants, orthodoxes…). « Chez les catholiques, les fêtes religieuses, hormis Noël et Pâques, ont perdu leur rôle fédérateur », observe Patrick Simon. Les catholiques immigrés font presque figure d’exception : pour preuve, 55 % des immigrés d’Afrique centrale vont régulièrement à la messe.

La fréquentation d’un lieu de culte est beaucoup plus intense chez les juifs dont 34 % se rendent souvent à la synagogue, les musulmans et les bouddhistes, qui sont respectivement 20 % à aller se recueillir dans une mosquée ou un temple. « On observe qu’il n’y a pas d’automaticité dans le fait de fréquenter un lieu de culte et même qu’il existe une privatisation croissante de la pratique religieuse », souligne Patrick Simon. « Les pratiques collectives des religions du salut s’affaissent au profit des religions identitaires individuelles », renchérit Olivier Bobineau, sociologue des religions.

La place de la religion n’est pas centrale pour tous les croyants

La rare fréquentation des lieux de culte ne signifie donc pas l’absence de pratique religieuse. Exemple avec l’islam : 58 % des musulmans pratiquent la prière au moins une fois par semaine, tout comme 32 % des bouddhistes. Quant à la pratique du jeûne, elle est très disparate selon les religions. Elle est très majoritaire chez les musulmans pendant le mois de ramadan : 75 % l’observent strictement. En revanche seulement 3 % des catholiques et 5 % des autres chrétiens jeûnent pendant le carême.



Et quand on les interroge sur la place qu’occupe la religion dans leur identité, les croyants en ont une vision très différente. Pour une majorité de juifs (54 %) et pour 30 % des musulmans, la religion est citée comme une dimension constitutive de leur identité alors qu’elle ne l’est que pour 6 % des catholiques. « Il existe en France, une forte tendance à la sécularisation. On attend des citoyens que leur religion soit moins visible. Ce qui explique le fait qu’elle soit une dimension de leur personnalité parmi d’autres pour les catholiques, contrairement aux immigrés pour lesquels elle plus centrale », analyse Patrick Simon. D’ailleurs, le rapport à la religion se transforme pour les immigrés avec le temps passé en France. « L’importance de la religion dans l’existence diminue chez les musulmans de la seconde génération, surtout ceux qui forment un couple mixte », souligne-t-il.

La transmission, une affaire de famille

Et si l’on a été élevé dans une famille croyante, ce n’est pas pour autant que l’on va se revendiquer de la religion de ses aînés. Certes, 91 % des personnes élevées dans une famille musulmane ont épousé la religion de leurs parents. Cette transmission est très forte aussi chez les juifs (84 %). Mais les familles chrétiennes transmettent moins leur religion : 67 % des personnes élevées par des parents catholiques et 69 % par des parents d’autres confessions chrétiennes se revendiquent de la même religion. « Les degrés de transmission sont beaucoup moins forts quand les deux parents ont des religions différentes : 57 % des personnes ayant grandi dans une famille mixte ne prennent pas la religion d’un de leur parent », indique Patrick Simon. Des données passionnantes pour comprendre comment évolue notre pays.

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