On l’appellera Carole. Agée de 59 ans, elle vit en Bretagne, et ne pensait pas franchir un jour la porte du Secours catholique pour demander de l’aide. Ancienne secrétaire de direction, devenue exposante sur les salons, elle ne s’étend pas sur sa situation, et ne souhaite pas être reconnue. Mais elle veut témoigner : de la crise sanitaire liée au Covid-19 et des confinements, qui ont fait disparaître soudainement son activité professionnelle, sans le filet de sécurité des indemnités de chômage puisqu’elle était travailleuse indépendante ; et surtout « de l’écoute et du soutien, moral et financier » que lui a offert l’association quand elle a traversé un drame familial. Depuis, un problème de santé l’empêche de reprendre les salons, et elle a beau décrocher parfois des entretiens d’embauche, elle est « toujours trop ou pas assez compétente pour le poste ». Elle vit avec 497,5 euros de RSA, en faisant « très, très attention ». Elle n’a encore jamais recouru à l’aide alimentaire, et espère pouvoir s’y tenir.
Le Secours catholique a accueilli 75 % de personnes nouvelles lors de la crise liée au Covid-19. Dans son rapport annuel, publié jeudi 17 novembre, il indique que les femmes seules comme Carole, sans enfant à charge, souvent en activité et âgées de plus de 50 ans, sont venues plus nombreuses en 2020, victimes d’une dégradation soudaine de leurs revenus, non compensée par des aides d’urgence. Beaucoup sont restées en 2021, signe que leur situation ne s’est pas suffisamment rétablie. La part des chômeurs de longue durée a augmenté. Les étrangers, et plus encore ceux au statut légal instable, interdits de travailler et peu aidés par l’Etat, ont, eux aussi, eu un besoin accru d’accompagnement lors de la crise sanitaire. Ils représentent désormais 47 % des adultes accueillis. Sur la même période, les mères isolées, qui représentent un quart des ménages rencontrés par l’association, l’ont moins sollicitée, probablement parce qu’elles bénéficiaient d’aides ponctuelles de l’Etat. Leurs revenus sont néanmoins retombés en-deça de leur niveau précrise ensuite.
Globalement, « les temps sont devenus encore plus difficiles pour les plus pauvres en 2021 », résume la présidente du Secours catholique, Véronique Devise. La part des ménages rencontrés vivant sous le seuil d’extrême pauvreté, c’est-à-dire avec moins de 755 euros par mois, est passée de 66 % à 69 %. Ils étaient 22 % à ne disposer d’aucune ressource. Les enfants, qui représentent la moitié des personnes accueillies, ont été particulièrement touchés : 30 % des moins de 5 ans vivaient en 2021 dans un foyer sans ressources, en hausse de 2 points par rapport à 2020.
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